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Charles Nodier: le promoteur de vampires

A propos des Vampires, j'ai déjà mentionné un poème de Lord Byron intitulé Le Giaour. Il m'a semblé qu'il fallait également rendre hommage à Charles Nodier (1780-1844) qui participa activement à la diffusion du vampirisme. De janvier à septembre 1813, Charles Nodier occupe le poste de bibliothécaire municipal à Laybach (Ljubljana, capitale actuelle de la Slovénie). Ce séjour dans les provinces illyriennes permet à l'écrivain français de s'imposer comme spécialiste des cultures slaves puis de s'approprier le thème du vampirisme.

Ainsi, en 1919, lorsque paraît la traduction française du Vampire de Polidori (paru sous la signature de Lord Byron), Charles Nodier publie une critique élogieuse dans la revue des Débats.
L'année suivante paraît Lord Rutwen ou les Vampires, un roman de C.B.(il s'agit de Cyprien Bérard, directeur du Théâtre de Vaudeville), préfacé par Charles Nodier et présenté comme une suite du Vampire de Byron/Polidori. Le 13 juin 1820, au théâtre de la Porte Saint-martin, Nodier (en collaboration avec Carmouche et Jouffroy) présente Le Vampire. Ce un mélodrame en trois actes, qui s'inspire également de l'œuvre anglaise, rencontre un fort succès et donne lieu à de nombreuses imitations et parodies. La même année, Charles Nodier publie Smarra ou les démons de la nuit où le thème du vampirisme n'apparait qu'en filigramme. En 1822, enfin, parait Infernaliana, ou anecdotes, petits romans, nouvelles et contes sur les revenants, les spectres, les démons et les vampires, un recueil qui emprunte, entre autres, aux textes de Dom Calmet et de Lenglet-Dufresnois. Ce livre clôt la période vampirique de Nodier mais ouvre celle de la "boutique romantique" (ainsi que l'appelait Musset) avec Prosper Mérimée, Théophile Gautier ou Lautréamont.

Un soldat hongrois étant logé chez un paysan de la frontière, et mangeant un jour avec lui, vit entrer un inconnu qui se mit à table à côté d’eux. Le paysan et sa famille parurent fort effrayés de cette visite, et le soldat, ignorant ce que cela voulait dire, ne savait que juger de l’effroi de ces bonnes gens. Mais le lendemain, le maître de la maison ayant été trouvé mort dans son lit, le soldat apprit que c’était le père de son hôte, mort et enterré depuis dix ans, qui était venu s’asseoir à table à côté de son fils, et qui lui avait ainsi annoncé et causé la mort.

Le militaire informa son régiment de cette aventure. Les officiers-généraux envoyèrent un capitaine, un chirurgien, un auditeur et quelques officiers pour vérifier le fait. Les gens de la maison et les habitans du village déposèrent tous, que le père du paysan était revenu causer la mort de son fils ; et que tout ce que le soldat avait vu et raconté était exactement vrai. En conséquence, on fit déterrer le corps du spectre. On le trouva dans l’état d’un homme qui vient d’expirer, et ayant le sang encore chaud ; on lui fit couper la tête et on le remit dans son tombeau. Après cette première expédition, on informa les officiers qu’un autre homme, mort depuis plus de trente ans, avait l’habitude de revenir ; qu’il s’était déjà montré trois fois dans sa maison à l’heure des repas. Que la première fois il avait sucé au cou son propre frère, et lui avait tiré beaucoup de sang ; qu’à la seconde fois il en avait fait autant à un de ses fils ; qu’un valet avait été traité de même à la troisième fois ; et que ces trois personnes en étaient mortes. Ce revenant dénaturé fut déterré à son tour ; on le trouva aussi plein de sang que le premier vampire. On lui enfonça un grand clou dans la tête et on le recouvrit de terre.

La commission croyait en être quitte lorsque de tous côtés il s’éleva des plaintes contre un troisième vampire, qui, mort depuis seize ans, avait tué et dévoré deux de ses fils ; ce troisième vampire fut brûlé comme le plus coupable : après ces exécutions, les officiers laissèrent le village entièrement rassuré contre les revenans qui buvaient le sang de leurs enfants et de leurs amis.


Vampires de Hongrie, Infernaliana, Charles Nodier, 1822.


A propos de Charles Nodier

Nodier et le commerce des vampires de Daniel Sangsue in Revue d'histoire littéraire de la France, Armand Colin, 1896, pp231-245

Charles Nodier, Du fantastique en littérature par Ada Myriam Scanu, Séminaire d'histoire littéraire, Revue des Littératures de l’Union Européenne, Università degli Studi di Bologna

Charles Nodier, Colloque du deuxième centenaire, Annales littéraires de Université de Besançon, Les Belles Lettres, 1981

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