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Cafés littéraires parisiens #4 Saint-Germain-des-Prés

Après plusieurs étapes dans les estaminets et cabarets de la butte Montmartre, la tournée des Grands Ducs sur les Champs-Élysées et le long des Grands Boulevards, puis l'échappée cosmopolite dans les brasseries de Montparnasse, nous voilà arrivée au terme de notre voyage, le quartier Latin, qui aurait aussi bien pu être son point de départ puisqu'il est le foyer des artistes et des poètes depuis le 17ème siècle.


Boris Vian, Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir


Les acteurs se réunissent alors dans les nombreux établissements du quartier de la foire Saint-Germain. Si on en croit Louis-Sébastien Mercier, dans son Tableau de Paris (1781) la capitale compte déjà six à sept cents cafés, parmi lesquels le fameux Procope. Bien plus tard, les Germanopratins pourront profiter des clubs de Jazz qui colonisent Saint-Germain-des-Prés. On y voit notamment Boris Vian et ses amis. Après la seconde guerre mondiale, le Café de Flore, les Deux Magots et la Brasserie Lipp, deviennent de « véritables institutions aussi célèbres que des institutions d’Etat », ainsi que l'écrit Léon-Paul Fargue, dans Le piéton de Paris. Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir sont parmi leurs hôtes les plus assidus.



Paul Verlaine au Procope, 1899


Le Procope, 13 rue de l'Ancienne Comédie, 75006 Paris (Métro : Odéon)
Fondé en 1686, Le Procope est le plus ancien café littéraire, s'y on excepte le La Pomme de Pin, La Croix de feu et Le Mouton Blanc. Jean de La Fontaine, Jean Racine et Crébillon père sont ses premiers hôtes de marque. Au 18ème siècle, il est fréquenté par les encyclopédistes (Voltaire, Diderot et d’Alembert) qui y rédigent quelques articles. Montesquieu, quant à lui, y fait allusion dans ses Lettres persanes. Pendant la Révolution françaises, le Procope devient le quartier général du Le club des Cordeliers. De nombreuses sociétés savantes y élisent domicile et les écrivains le fréquentent longtemps, à l'instar d'Alfred de Musset, de Paul Verlaine, de George Sand, de Victor Hugo, de Théophile Gautier, d'Honoré de Balzac, de Joris-Karl Huysmans, d'Oscar Wilde, et d'Anatole France.



Simone de Beauvoir et Jean-Paul Sartre au Café de Flore, 1944. Brassaï


Le Café de Flore, 172 boulevard Saint-Germain, 75006 Paris (Métro: Saint-Germain-des-Prés)
Le Café de Flore ouvre ses portes en 1885 et la Revue d'Action française de Charles Maurras s'installe au 1er étage en 1899. En 1913, la revue Les soirées de Paris, dirigée par Guillaume Apollinaire, investit le rez-de-chaussée. Les surréalistes, André Breton et Louis Aragon, s’installent en terrasse dès 1919. Trois ans plus tard, c'est au tour de la rédaction de la revue Le Divan d'investir les banquettes du Flore. André Malraux y a ses habitudes. A partir des années 1930, c'est tout le Paris littéraire qui s'y donne rendez-vous: Georges Bataille, Robert Desnos, Léon-Paul Fargue, Raymond Queneau et Michel Leiris. Le Groupe Octobre, la troupe de théâtre française d'Agitprop (Département pour l'agitation et la propagande), monopolise les trois quarts de la salle. A coté de la bande à Prévert, la famille Sartre/Beauvoir, s'installe au début de la seconde guerre mondiale. Leur bureau est au premier étage. Marguerite Duras et le groupe communiste ont aussi élu domicile au Flore. Pendant ce temps, Boris Vian rédige "le manuel de Saint-Germain des Prés" et joue de la trompette dans les caves. Après la guerre, le Café de Flore ressemble davantage à un café anglais. Arthur Koestler, Ernest Hemingway, Truman Capote et Lawrence Durrell en forment le noyau, autour du Pouilly Club de France (PCF) créé par Paul Boubal, propriétaire du Flore. Dans les années 1960, on y croise les tenants de la Nouvelle Vague et Nouveau Roman: Romain Gary, Françoise Sagan, Alain Robbe-Grillet, Nathalie Sarraute, Michel Butor, Philippe Sollers... Sur les banquettes voisines, sont installés les penseurs structuralistes, avec en tête Jacques Lacan et Roland Barthes. Au Flore, cohabitent aussi les auteurs Figaro, François Nourrissier ou Jean d’Ormesson. Parmi les fidèles, on peut encore citer Albert Cossery, Pierre Bourgeade, Jorge Semprun, Tahar Ben Jelloun ou Bernard-Henri Lévy. Le romancier brésilien, Paulo Coelho, aime y revenir lors de ses escapades parisiennes, de même que l'Américain Paul Auster. En 1994, Frédéric Beigbeder crée un Prix littéraire au nom du café.



Janet Flanner et Ernest Hemingway au Café des Deux-Magots, 1940-45


Les Deux Magots, 6 Place St Germain des Prés, 75006 Paris (Métro : Saint-Germain-des-Prés)
Le Café Les Deux Magots est fondé en 1885 sur l'emplacement d'un magasin de nouveautés du même nom. Paul Verlaine, Arthur Rimbaud et Stéphane Mallarmé sont les premiers à investir les lieux. Ils entraînent dans leur sillage les représentants du symbolisme (comme Gustave Kahn) de la pataphysique (Alfred Jarry), du surréalisme (André Breton en tête) puis de l'existentialisme. Le Prix des Deux Magots est créé en 1933 par l'écrivain Roger Vitrac. Le café accueille les directeurs et écrivains de La Nouvelle Revue française (NRF) : André Gide, Jean Paulhan, Henri Michaux ou Antoine de Saint-Exupery. Les expressionnistes et les exilés de langue allemande (Robert Musil, Bertolt Brecht,Heinrich Mann, Stefan Zweig) s'y croisent aussi. Jean-Paul Sartre y rencontre Albert Camus et Jean Genet, tandis que Simone de Beauvoir s'y réfugie lorsqu'il est fait prisonnier pendant la guerre. Parmi les hôtes illustres des Deux Magots, on peut encore citer Oscar Wilde, James Joyce, William Faulkner, Paul Léautaud, Louis Aragon, Elsa Triolet, Antonin Artaud, Jean Cocteau, Jean Tardieu, Roland Dorgelès,, Jean Giraudoux, Paul Morand, etc.




Antoine de Saint-Exupéry à la Brasserie Lipp


Brasserie Lipp, 151 Bld. Saint-Germain, 75006 Paris (Métro: Saint-Germain des Prés)
La Brasserie Lipp apparait en 1880 et attire d'emblée les poètes comme Paul Verlaine ou Guillaume Apollinaire. La troupe du Vieux-Colombier, avec Louis Jouvet s'y réunit après le spectacle. En 1920, Marcellin Cazes reprend l'établissement et, 15 ans plus tard, créé un prix littéraire portant son nom. Dans les années 30/40, la Brasserie devient le point de chute d'André Gide, d'Antoine de St Exupéry, d'Ernest Hemingway, d'André Malraux, de Françoise Sagan, d'Albert Camus… Il s'y fonde même un groupe littéraire : les Poètes du mercredi. Parallèlement aux politiciens, qui en font la cantine de la Chambre des députés, de nombreux écrivains et artistes défilent sur les banquettes de la Brasserie Lipp. Parmi les hôtes célèbres, on compte le poète Raymond Queneau, le romancier Marcel Proust, l'écrivain Yves Simon, le philosophe Bernard-Henri Lévy, l’auteur égyptien Albert Cossery ou l'espagnol Jorge Semprun. En février dernier, le journal Livres hebdo à annoncé le lancement d'un nouveau prix littéraire dans la succursale mexicaine de La Brasserie Lipp, basée à Mexico. En juin prochain, il récompensera une œuvre littéraire en langue espagnole.


Photo de gauche: Jacques Prévert, Quai St Bernard, Paris 5ème, 1955. Robert Doisneau
Photo de droite: Samuel Beckett au Petit Café, Bd Saint-Jacques, Paris, 1985. John Minihan.

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