Deux travailleurs clandestins, une chinoise, un camion-citerne pour la vidange des fosses septiques, un dirigeant d'entreprise, un match de base-ball, un message secret,, un homme dans un jardin, un père mourant, un financier américain et sa jeune épouse, un policier, un détraqué irlandais, quelques mafieux, un chinois et ses hommes de main, des financiers. Voilà, tous les ingrédients qui forment le thriller de Colin Harrison. Une histoire compliquée en apparence...
Avec cette suite de mots, je résume de manière assez fidèle les premiers chapitres de ce roman. Et oui, après un premier chapitre assez édifiant, tout au moins pour le lecteur moins qu'occasionnel de roman policier que je suis, ça part dans tous les sens. Des personnages débarquent apportant avec eux leur propre chapitre, leurs propres problèmes et opacifiant encore plus le récit. Assez rapidement, un grand nombre d'entre eux s'occupent à la même tache: trouver la fille! Les autres s'occupent de leur propres affaires, sans savoir qu'eux aussi courent après la fille.
Je ne vais pas résumer de manière plus claire l'histoire pour ne gâcher le plaisir d'aucun futur lecteur. Je me contenterai de dire que je ne vois aucun rapport entre le titre et le contenu: dans ce livre, il ne fait pas particulièrement noir et l'action ne se passe pas spécialement à Manhattan.
Alors tout ça paraît bien compliqué, d'une part, et pas très original, de l'autre. La complication peut faire l'originalité de l'histoire, tout le talent de l'auteur étant de savoir s'il est capable ou non d'exprimer clairement une situation complexe (vous remarquerez ici la parfaite antithèse des écrits de Philippe Solers). Colin Harrison réussi ici le pari: l'intrigue se dévoile progressivement et des liens se tissent entre le patchwork de personnages. Le livre nous tient donc en haleine et chaque chapitre divulgue un indice vers la compréhension. La narration est très claire et fluide.
Un roman policier sans faille alors? Non, pas tout à fait. Colin Harrison pêche sur ses personnages et s'étale dans des détails psychologiques et historiques (des personnages) qui n'apportent rien à l'histoire et même sont parfois contradictoires avec les actions d'un personnage. Ces scénettes sont bien écrites mériteraient peut-être pour certaines d'entre elles, un roman pour elle toute seule, mais viennent alourdir le récit d'une manière malhabile. Et je ne parlerai pas, quoique je le fasse présentement, du passage de sodomie vers la fin du roman, qui à l'air de venir suite à une commande de l'éditeur. Peut-être un acte sexuel est un des codes du thriller, mais là je n'en vois vraiment pas la motivation sauf d'éveiller un côté voyeuriste chez certains lecteurs.
Enfin, une note pour ceux qui cherchent un sens caché dans tous les propos et qui restent persuadés que lire est forcément un acte intellectuel: je n'ai vu aucun message dans ce roman. Pas de satire, de critique, de jugement, de description ultra-réaliste de la misère sociale, non, rien qu'un marcheur citadin ne puisse découvrir ou entendre s'il se défait de ses œillères solaires et autres oreillettes musicales.
La nuit descend sur Manhattan de Colin Harrison est un roman agréable à lire pour le lecteur occasionnel de roman policer que je suis. J'avoue n'avoir aucune idée de ce qu'un grand lecteur de roman noir en penserait. L'histoire est bien ficelée et pourrait faire l'objet d'une adaptation au cinéma. Nous avons, là, un livre de divertissement qui permettra de passer un bon moment de lecture.
Titre: La nuit descend sur Manhattan
Auteur: Colin Harrison
Editeur: 10/18l (édition française originale: Belfond (22 janvier 2009))
Parution: Juin 2010
Pages: 445