Baromètre du livre (+ PLUS)

A propos de la rentrée littéraire 2011

Depuis le coup d'envoi de la rentrée littéraire le 18 août dernier, les lecteurs appliqués sont sans doute déjà débordés. Aussi, pour ne rien perdre des débats en cours, nous vous proposons une revue de presse non-exhaustive et forcément suggestive.

Livres Hebdo, le journal de référence des professionnels, annonçait en juillet dernier avec une précision quasi-chirurgicale que 654 nouveautés paraîtront en cette période de rentrée littéraire. On ne peut s'empêcher de penser que les médias nous prescrivent une dose homéopathique consensuelle de cette production éditoriale, puisque leurs sélections sont limitées à une dizaine d'auteurs... toujours les mêmes, quelque soit le journal ou l'émission !

Il semblerait, selon Raphaël Sorin, conseiller éditorial au sein du groupe Libella (Buchet-Chastel, Phébus), que nous assistions à un phénomène de vitrification de la rentrée littéraire. Il se traduit par une propension au buzz (une loi scientifiquement prouvée qui permet de booster les ventes en créant le bestseller sensationnel), et par voie de conséquence au pitch, un procédé qui permet d'expédier la critique à coups de brefs commentaires dithyrambiques. La concurrence est ainsi réduite à peau de chagrin, soit une dizaine de titres incontournables.

Les élus, quant à eux, doivent adopter la posture littéraire qui s'impose, ainsi que nous l'explique Pierre Assouline dans Le Monde.

On imagine que la pression est à son comble et que les auteurs, non rompus à l'art du paraître, ne soient tentés de se soustraire au rituel l'adoubement. Dans ce cas, la meilleure solution est celle de l'accouchement littéraire sous X. Comme l'explique Hubert Artus dans un article de Rue89, l'adoption d'un pseudonyme est devenu indispensable aux écrivains attachés à leur liberté créatrice.

Ceci et cela étant posés, une question nous vient à insidieusement à l'esprit : les professionnels savent-ils compter ? Et d'ailleurs, qui compte les livres de la rentrée littéraire ? Réponse de Benjamin Berton sur Fluctuat.net.

Une question en amenant une autre, il semble légitime de s'interroger sur le devenir des challengers ? On imagine qu'ils ne vont pas échouer au rebut sitôt imprimés. Les livres excluent du circuit ont-ils une chance de s'en sortir. Pour répondre à cette interrogation, il faut se pencher sur le chemin à parcourir, depuis la conception de l'oeuvre, en passant par les rayons surchargés de la librairie qui la conduira jusqu'au panier du lecteur. La journaliste Catherine Simon s'est glissé Dans la peau d'un livre pour mener cette enquête.

Puisque nous évoquons les libraires, il semble légitime d'examiner le rôle qu'ils jouent dans le spectacle culturel de la rentrée littéraire. Or, face à la concurrence grandissante du livre numérique et de la vente en ligne, il paraît de moins en moins déterminant. En cette période de rentrée littéraire, les libraires indépendants doivent avant tout défendre leurs propres positions. Sur le site Agora Vox on s'interroge déjà sur ses chances de survie.

En plus de l'ingérence absolutiste des éditeurs, des coups de buzz et du virus numérique, la rentrée littéraire pourrait bien être perturbée par un phénomène extérieur redondant, à savoir la concurrence la « fiction vraie ». Les rebondissements en feuilleton de l'actualité vont-ils focaliser l'attention du lecteur sur les déboires politico-judiciaires d'un Dominique Strauss-Kahn au détriment des œuvres romanesques d'un Jonathan Franzen ? Telle est la question posée par Nelly Kaprièlian dans La rentrée littéraire concurrencera-t-elle les feuilletons de l'actualité ?


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