Lorsqu’on évoque Eliot Ness, on pense immédiatement à l'incorruptible qui a lutté contre le banditisme durant la Prohibition. Pourtant, la grande affaire de sa vie n’est pas l’arrestation d’Al Capone à Chicago, mais le cas Torso, le premier serial killer de l’histoire américaine…

Au milieu des années 30, alors que le pays est ravagé par la dépression économique, Cleveland est le théâtre d’une série de meurtres particulièrement macabres. Les mutilations infligées aux victimes rendent leur identification pratiquement impossible. Après les avoir entièrement vidés de leur sang, le meurtrier découpe méticuleusement les cadavres puis en éparpille les morceaux dans la nature (torses sans têtes et vice et versa), d’où son surnom de Torso. Selon le médecin légiste, les indices tendraient à prouver que les victimes étaient toutes issues d’un milieu social défavorisé. L’hypothèse se confirme lorsque la police découvre les restes de Flo Polito, une prostituée. Pour les détectives Walter Myrlo et Sam Simon, c’est le début d’une enquête d’autant plus fastidieuse qu’officiellement le cas n’a jamais été résolu.

Le scénario de ce roman graphique est évidemment inspiré des meurtres perpétrés entre 1934 et 1938 dans le quartier de Kingsbury Run à Cleveland. Cependant, les auteurs se sont autorisés quelques libertés dans le traitement du sujet. L’illustration, par exemple, est une sorte de pot pourri qui juxtapose les dessins et les photographies d’époque. De même, le noir profond de l’encrage, les vignettes sens dessus dessous ou les bulles qui s’empilent en colonne, témoignent de la volonté des auteurs de se démarquer. Cette originalité est certes le point fort de Torso, mais en même temps son principal défaut. Ce qui enthousiasme le lecteur au premier abord, devient un peu pesant au bout de 200 pages. Malgré ce bémol, il me semble qu’il serait dommage de passer à coté de ce roman graphique qui, à coté de From Hell d’Alan Moore, s’impose déjà comme une référence du genre.

Torso de Brian-Michael Bendis & Marc Andreyko, Ed. Semic, 280 pages