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Howard Zinn: L'Histoire par en bas

Notre Citathon du jour rend hommage à l'historien et politologue américain, Howard Zinn (1922-2010) disparu le 27 janvier dernier. Howard Zinn s'est attaché à raconter l'Histoire, non pas du point de vue des vainqueurs et des "Grands Hommes", comme elle traditionnellement présentée dans les manuels scolaires, mais celle des minorités et des déshérités. Sa monumentale Histoire populaire des États-Unis, traduite tardivement en français, l'a révélé au grand public.

L'œuvre Howard Zinn est aujourd'hui étudiée dans les écoles et les universités. Son Histoire populaire des États-Unis a également fait l'objet d'une adaptation en bande dessinée (Une histoire populaire de l’empire américain), une version sans doute plus accessible que son pavé de plus de 800 pages.

Tous ces livres d'histoire américaine qui se focalisent sur les Pères Fondateurs et sur les présidents successifs pèsent lourdement sur la capacité d'action du citoyen ordinaire. Ils suggèrent qu'en temps de crise il nous faut chercher un sauveur : les Pères Fondateurs pour la Révolution, Lincoln pour la sortie de l'esclavage, Roosevelt pour la Grande Dépression, Carter pour la guerre du Vietnam et le scandale du Watergate. En revanche, entre les crises, tout va pour le mieux et il faut nous contenter du retour à la normale. Les livres d'histoire classiques nous apprennent encore que l'acte suprême du citoyen est de désigner son sauveur en allant voter tous les quatre ans pour choisir entre deux Blancs relativement riches, anglo-saxons de surcroît et mâles par-dessus tout, à la personnalité terne et aux opinions parfaitement orthodoxes.


Une histoire populaire des États-Unis, éd. Agone, 2002, p. 747


Dans les manuels d’histoire américains, on trouve peu de traces des conflits de classes du XIXe siècle. Les périodes qui précèdent et suivent la guerre de Sécession (1860-1865) ne sont abordées que sous l’angle des questions politiques, électorales ou raciales. Même lorsqu’ils traitent des rapports sociaux et de l’économie, ces manuels se concentrent sur la fonction présidentielle et perpétuent ainsi la traditionnelle focalisation sur nos « héroïques dirigeants », aux dépens des luttes populaires.


Au temps des barons voleurs, article du Monde Diplomatique, 2002.


Ainsi, puisque le choix de certains événements et l'importance qui leur est accordée signalent inévitablement le parti pris de l'historien, je préfère tenter de dire l'histoire de la découverte de l'Amérique du point de vue des Arawaks, l'histoire de la Constitution du point de vue des esclaves, celle d'Andrew Jackson vue par les Cherokees, la guerre de Sécession par les Irlandais de New-York, celle contre le Mexique par les déserteurs de l'armée de Scott, l'essor industriel à travers le regard d'une jeune femme des ateliers textiles de Lowell, la guerre hispano-américaine à travers celui des Cubains, la conquête des Philippines telle qu'en témoignent les soldats noirs de Luson, l'Âge d'or par les fermiers du Sud, la Première Guerre mondiale par les socialistes et la suivante par les pacifistes, le New Deal par les Noirs de Harlem, l'impérialisme américain de l'après-guerre par les péons d'Amérique latine, etc.


Une histoire populaire des États-Unis, éd. Agone, 2002, p. 15






Bibliographie sélective
Une Histoire populaire des États-Unis. De 1492 à nos jours [A People's History of the United States: 1492 – Present, 1980]
Karl Marx, le retour [Marx in Soho: A Play on History, 1999]
L’Impossible Neutralité. Autobiographie d’un historien et militant
En suivant Emma [Emma: A Play in Two Acts About Emma Goldman, American Anarchist, 2002]
Désobéissance civile et démocratie [Disobedience and Democracy: Nine Fallacies on Law and Order, 1968]


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