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Les falsificateurs - Antoine Bello

Editions Folio, 2009, 588 pages
Ce livre n'est pas un polar mais la frontière est infime puisqu'il cumule plusieurs ingrédients du roman policier : mystère, suspense, crimes et mensonges. Autant le dire tout de suite: certaines questions resteront sans réponse car il s'agit d'un premier tome dont la suite, "Les éclaireurs", est parue en février dernier.

Sliv Dartunghuver, fraîchement émoulu de l'université de Reykjavik avec un diplôme de géographie en poche, vient de décrocher le boulot de ses rêves au sein du cabinet Baldur, Furuset & Thorberg. Après une première mission au Groenland où le jeune homme met le doigt sur quelques erreurs mineures mais grossières dans le rapport d'audit rédigé par ses collègues, son patron lui propose un emploi parallèle au sein d'un groupe interlope : le CFR (Consortium de Falsification du Réel). Il s'agit de monter des canulars d'envergure internationale, mais néanmoins ficelés de manière très professionnelle, grâce à une machinerie quasi militaire. Quelles est le véritable but de cette organisation ? D'où viennent les fonds colossaux dont ses agents disposent ? Qui tire les ficelles ? Autant de questions sans cesse éludées. Mais le goût du jeu et l'émulation collective qui règne au sein du CFR incite Sliv à accorder le bénéfice du doute à son énigmatique employeur.

Antoine Bello s'ingénu à mystifier son lecteur avec une dose d'humour qui frôle parfois le désenchantement ou le cynisme. Les grosses légumes du CFR prétendent ?uvrer pour l'évolution du monde mais sans qu'on ne sache vraiment dans quel sens. Parmi les jeunes recrues, les belles âmes côtoient des arrivistes de la pire espèce dans une course vers un sommet dont ils ignorent tout. L'ambivalence du personnage principal est un peu pathétique. Voilà un jeune homme talentueux qui ressent le besoin de s'investir dans un projet a-priori absurde pour trouver sa place dans la société. On lui conseillerait volontiers de s'inscrire dans une association humanitaire ou un parti politique mais son manque d'idéalisme exclu l'une et l'autre possibilité. A l'instar de Sliv, ses homologues sont prêt à s'embrigader en toute connaissance de cause dans une organisation dont certaines méthodes rappellent celles des régimes totalitaires. On sait que le CFR s'attache à réécrire l'histoire. S'agit-il s'exhumer celle des vaincus ou de manipuler les esprits à des fins moins honorables ? L'histoire justement, nous a montré que c'est toujours la seconde hypothèse qui l'emporte.


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