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Song of Troy - Colleen McCullough


Jamais deux sans TROIE ! Le regard qu’Hélène porte sur sa famille est réellement méprisant, que ce soit ses deux frères qui pourtant l’aiment et la protègent, ou sa sœur Klytemnestre dont elle admire toutefois la force de caractère (relation qui diffère nettement d’avec la version de Margaret George pour qui les deux sœurs étaient unies par une sincère affection).

Quant à leur mère, la belle Leda, qui fut aimée de Zeus, inutile de dire qu’elle s’en moque ouvertement, tout comme elle raille sa cousine, la douce (mais ennuyeuse selon Hélène) Pénélope qu’épousera Odysseus ; les talents de brodeuse de sa cousine sont un sujet de moquerie pour Hélène qui la considère comme dénuée non seulement de charme, mais aussi d’intelligence.
Non vraiment, cette Hélène-ci n’a rien de sympathique.

C’est fort intéressant ces versions différentes d’un même mythe et l’image que s’en font les écrivains.
Si pour Margaret George, il s’agissait de rétablir l’image de femme adultère de la Belle Hélène, cause d'un massacre historique, au risque de la représenter comme une victime innocente du sort injuste d’avoir été la plus belle femme de Grèce, pour Colleen McCullough pour sa part semble ressentir à l’égard de la reine de Sparte une animosité quasi rigide, sans aucune indulgence que l’on retrouve parfois dans certains commentaires acerbes d’une personne peu gâtée par la nature face à une femme belle et séductrice.

L’écrivaine australienne commente les chapitres de l’Illiade plus ou moins dans la chronologie d’Homère, chaque chapitre étant raconté à la première personne par les personnages les plus célèbres de ce long poème épique : Achille, Priam, Agamemnon, Odysseus, Hektor, Diomede, Automedon, Pâris, Hélène et Briseis.

Chacun raconte en fonction de l’évolution de la situation, telle l’inimitié entre le roi des Myrmidons et le roi des Rois de Mycènes, la querelle pour Chryseis.

Selon moi, Colleen McCullough se trompe sur l’âge d’Hektor et Pâris, les fils de Troie. Pour elle, Hektor serait plus jeune que Pâris, or jusqu’à présent, tous les auteurs s’entendent à dire que c’est le sage Hektor qui est l’aîné et l’héritier préféré du père, à la colère de Déiphobos, une brute guerrière à qui Hélène sera d’ailleurs donnée en mariage à la mort de Pâris.

Contrairement à la légende, l’auteure n’hésite pas à rompre le mythe de l’amour éternel que se sont voués Hélène et Pâris, le temps et les infidélités du fils de Troie, ayant fait leurs œuvres destructrices dans ce mariage.
Il semblerait qu’elle n’ait en définitive aimé qu’un seul homme, le héros Thésée, roi de l’Attique et d’Athènes qui l’enleva à 12 ans afin d’en faire sa maîtresse. Deux ans plus tard, Castor et Pollux les frères d’Hélène la récupérèrent et il sera alors grand temps pour Tyndare de la marier.
Pour son mari Menelas elle a une certaine affection condescendante, il faut dire qu’il se traîne d’amour à ses pieds !
Son amour immortel pour Pâris ne fut finalement qu’une passion passagère, rapidement éteinte par manque d’égards semblerait-il.

A Troie, en dehors du roi Priam, tout le monde traite Hélène avec mépris ; la reine Hécube, sa fille Cassandre et sa belle-fille Andromaque, la traitent avec une réelle méchanceté, la blâmant de cette guerre sans merci alors qu’elle n’a servi que de prétexte à Agamemnon, assoiffé d’ambition. Hélène, habituée à Sparte aux égards dus à son statut de reine, n’est rien d’autre à Troie qu’une épouse digne de broder et filer, reléguée au gynécée.

J’ignore quel est le problème de Mrs. McCullough, mais sa vision des femmes est assez désagréable ; on dirait une vieille bigote cachée derrière un rideau afin d’épier ses semblables et en parler avec mépris et sarcasmes.
En plus ce n’est même pas écrit avec humour, l’écriture n’est même pas belle, son style est plat et banal.

A la lecture de cette version-ci de la Guerre de Troie, il semblerait que les préférences de Colleen McCullough aillent nettement vers les Grecs, ces héros purs et durs, pleins de bravoure et de beauté ! Pour elle Agamemnon est plus sensible aux exploits guerriers qu’à la gloire, la fortune et au sac d’une cité célèbre pour ses richesses.
Son frère est dépeint comme un être falot, vivant dans son ombre, ce qui est une constante dans tous les récits de l’Illiade ; apparemment Menelas ne sert que de faire-valoir à son illustre frère.
Odysseus (dont le nom signifie pourtant « celui qui invente pour tromper ») est une homme habile, aux idées intelligentes.
Même l’ignoble fils d’Achille, Neoptoleme, assassin brutal qui égorgera Priam sur l’autel d’Apollon, trouve grâce à ses yeux. Quant au divin Achille, roi des Myrmidons, il est paré de toutes les qualités, même lorsqu'il exprime son mépris et sa haine à sa mère. Charmant !

De toutes les versions que j’ai lues jusqu’à présent sur cette Guerre de Troie, celles que je préfère – et de loin – sont celles de Luciano de Crescenzo et Marion Zimmer Bradley. Le premier, auteur italien, a pris le parti de relater l’Illiade sur un ton impertinent, à travers les yeux d’un jeune prince à la recherche de son père ; la seconde a donné une version féministe du poème d’Homère, ne donnant la parole qu’aux femmes, mais dans une belle écriture.

Quant à la version de Margaret George, le point de vue d’Hélène, est relaté sur un mode un peu trop geignard à mes yeux.

Mais la version de Colleen McCullough bat tous les records : on dirait une version pour la collection « Harlequin ». Au moins nous a-t-elle épargné les 900 pages constituant chaque volume de la saga"The Masters of Rome".
Décidément, en dehors du sensible et court roman « Tim », je n’apprécie pas vraiment l’auteur des « Oiseaux se cachent pour mourir » !


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